Piège?

Artemis pensait partir vers la ville mais c'était si prévisible d'après ce qu'elle avait dit à Amar. Le collier brillant autour de son cou, elle quitta le village des traqueurs et s'engagea dans la forêt. Il faisait nuit mais elle s'en fichait. Elle avait appris à vivre par ses propres moyens. Elle espérait rencontrer une aide et en même temps elle le craignait car si elle avait deviné juste, Amar les retrouverai. Elle courrait toujours et pensant au traqueur elle pensait aux traces. Il était temps d'utiliser tout ce qu'elle avait appris. Elle grimpa dans un arbre et se déplaça ainsi.

En effet, la forêt était si dense que les branches se croisaient et s'entrecroisaient lui rendant l'exercice plus aisé. Les pâles rayons de Lune la réconfortait. Où aller? Elle le savait déjà. Elle se rendit donc en calculant sa route par rapport aux étoiles.

Au bout de longues heures de déplacement, elle arriva enfin sur le lieu de son ancien village. Rasé, il n'en restait absolument rien. Même pas les corps. Des larmes montèrent aux yeux de la jeune fille. Soudain, un nuage de cendre s'éleva à ses pieds dans le vent de la nuit éclairée par la lumière argentée.

- Des cendres...

Elle comprit. Ils avaient tout brûlé ces chiens! Elle le haïssait de tout son être. Là était sa maison avant. Son enfance. Des enfants. Des rires. Des fêtes. Des amis... La Liberté. Amar avait raison. Elle refusait la liberté quand elle devait la désirer. Par peur et par lâcheté. Elle s'en voulut. Injustice. Elle leur en voulait. Une rage sourde grondait en elle. Mais elle ne dit rien. Elle disparut dans les roches de la montagne et trouva le promontoire où elle montait observer le monde et la forêt à leur insu. Nostalgique, mélancolique, son regard errait, perdu dans le monde vaste qui l'entourait. Le vent agitait les branchages et la douce musique berçait Artemis. Elle retira le collier et l'observa de nouveau. Rien ne laissait paraître qu'il était piégé. Elle se trompait sûrement. Amar ne l'aurait pas libéré. Elle soupira et serra le collier contre elle.

* Qui que tu sois Amar... Si tu me retrouves... Tu n'en sortiras pas vivant! Je le jure! JAMAIS JAMAIS TU NE SORTIRAS VIVANT DE CET ENDROIT! *

Elle avait l'avantage du terrain qu'elle connaissait parfaitement. Le lendemain, elle organiserai sa vie ici. Déjà, elle enlèverai toutes ces mauvaises herbes qui n'étaient pas là avant et rendrait ainsi hommage à ceux qu'elle avait aimé. Elle s'endormit.

Elle était réveillée. Un bruit suspect, différent de ceux émis par la forêt. Elle se releva à demi et scruta l'obscurité. Le bruit se confirma. Elle se cacha discrètement, attendant que la personne car il y avait quelqu'un, se dévoile.

Artemis s'était réveillée en sursaut. Au début elle était restée immobile, le temps de confirmer le bruit qu'elle avait entendu. Alors qu'elle s'esquivait, elle se rendit compte que l'autre personne était déjà là. Artemis n'avait pas une vue excellente dans le noir. Seulement une ouie habituée aux bruits de la forêt et donc à ceux qui ne le sont pas. Un ancien réflexe de la peur d'être attaquée la nuit. Chose qui s'était de toutes façons passées.

Elle vit seulement une silhouette. Il semblait venir en signe de paix. Artemis restait méfiante. Il se décida enfin à parler.

"Calmez vous, je ne vous ferais aucun mal. "

Artemis n'était pas vraiment convaincue. Comme être sûre qu'il ne s'agissait pas d'un piège? Enfin elle était repérée. Elle pouvait donc parler.

- Qui êtes vous? Que voulez vous?

La Lune éclaira enfin faiblement le jeune homme. Enfin elle pensait ça par rapport à sa voix. Elle tenait instictivement le collier d'Amar, s'y cramponnant. Bon. Il ne semblait pas être un humain ou un traqueur en particulier. Elle se calma même si elle restait particulièrement méfiante.
Elle avança de quelques pas mais laissa une bonne distance entre eux. Après tout, il pouvait être un psychopathe, un meurtrier ou un traître ou...Pire encore. La jeune fille observait Calintz. Au premier jugement il semblait correct. Mais elle avait appris a toujours réserver ses jugements. Elle était sur une corniche. Dos au vide. Elle jeta un bref coup d'oeil pour s'assurer une fuite en cas de besoin et pensa que c'était probablement très dangereux.

- Que faites vous ici?

Il était chez elle. Dans son domaine. Un domaine ravagé qu'elle aimerait reconstruire un jour mais hélas, c'était utopique. Surtout qu'il y avait Amar. Elle le testait mais elle aimait sa vie d'esclave. Etre libre, c'était vivre dans la peur. La vie d'esclave c'était vivre en accomplissant quelques taches ménagères. En échange on recevait nourriture et logis. Parfois c'était pénible mais les deux situations avaient leurs avantages et leurs inconvénients. Elle avait fait son choix.

Artemis se radoucit en entendant que son interlocuteur était un Neko. Elle l'écouta silencieusement. Elle hésitait mais quand il parla de son village, sa méfiance disparut. Il avait bien en plus les caractéristiques d'un Neko.

"Je suis Calintz Jerehvian, neko libre. Je cherchais un coin où dormir et je me suis dit que je pourrais demander l'hospitalité dans le village d'hybride non loin d'ici... Tout a été détruit, c'est navrant... Il y avait des familles qui vivaient là bas... Et maintenant elles sont séparées peut être pour toujours... Vous vous en êtes sûrement sortie ? J'espère qu'il y a eu d'autres personnes qui ont pu fuir... Si vous voulez que je quitte vos terres, je le ferais. Vous n'avez qu'à me le demander."

Elle ne répondit pas tout de suite. Elle était perdue dans des souvenirs. Elle remarqua soudain qu'il déposait les armes. Armes qu'elle aurait pu prendre si elle le voulait mais ce n'était pas le cas. Convaincue par les bonnes intentions de ce Calints Jerehvian, Artemis décida de se présenter.

- Pardonnez moi, Calintz Jerehvian de m'être méfiée de vous. Tout est si dangereux aujourd'hui. Je suis Artemis, une hybride. Ce village était le mien et je suis navrée de ne point pouvoir vous offrir l'hospitalité que l'on pouvait y trouver naguère. Il y a un an, le village a été attaqué en pleine nuit par des traqueurs. Tous ceux qui essayaient de protéger leurs enfants étaient massacrés. Tout comme les très jeunes enfants. Ils nous ordonnaient de fuir mais le piège s'est refermé sur nous: des traqueurs nous attendaient et nous cueillaient plus loin. J'ai eu le malheur d'être capturée et vendue à une vieille femme. J'ai eu le bonheur d'être tombée sur une femme très gentille qui ne me considérait pas comme un jouet. Elle est devenue une mère pour moi. Hélas elle est morte il y a quelques jours et j'ai été revendu à un homme qui m'a libéré...

Elle décida de ne pas plus s'étendre. Elle ne voulait pas dire que cet homme qui l'avait "libéré" était un traqueur qui lui tendait un piège. Par contre elle pensa à prévenir indirectement le jeune Neko de ne pas rester longtemps désarmé.

- Reprenez vos armes... On ne sait jamais ce qui rôde dans la nuit, même quand on connaît par coeur la forêt qui nous entoure.

Elle esquissa un sourire.

- Je suis revenue ici dans l'espoir de retrouver des amis mais apparemment... Le peu qui a pu s'en sortir à dû être asservi ou tué. C'est si injuste!

Elle pensait à Amar. Si jamais il la suivait ou autre... Elle mettait Calintz en danger mais en même temps elle ne voulait pas rester seule ici... Comment faire? Il fuirait si elle lui disait qu'elle préférrait largement l'esclavage à la liberté, si elle lui disait qu'un traqueur était peut etre sur ses traces... Elle était tourmentée et ne savait pas trop comment réagir.


- Vous pouvez rester ici si vous le souhaitez mais restez sur vos gardes et partez si quoique ce soit d'anormal vient.

Artemis fut rassurée de voir son interlocuteur se réarmer. Elle sourit face à sa sympathie. Oui... Il devait être quelqu'un de vraiment bien. Elle se sentie plus sereine mais aussi moins seule. Protégée en quelque sorte même si elle pensait déjà à rentrer. Elle n'aimait plus trop la liberté. C'était trop difficile de survivre libre à ses yeux. Comment l'expliquer sans en avoir l'air?

- C'est très gentil à vous j'apprécie... Seulement... Seulement on apprend pas en quelques heures, il faut beaucoup s'entraîner et je n'aurai pas la force necessaire pour tenir l'une de vos armes. Je me débrouille sans ne vous inquiètez pas.

Artemis répondit à son sourire et réfléchit.

- Ici même. C'était... C'était mon point d'observation enfant. On voit l'ennemi approcher et il ne peut pas nous rejoindre sans passer par le chemin que vous avez pris... Faire équipe... J'accepterai volontiers mais hélas, je ne puis ... Je vous ralentirai et je compte bientôt... Je compte rester ici jusqu'à demain seulement. Après j'ai des projets et je ne peux vous les révéler. Je vous mettrai en danger, chose que je refuse absolument.

C'était vrai. Elle voulait retourner auprès d'Amar au plus vite et devenir une esclave exemplaire. Enfin non. Elle ferait le nécessaire et s'il s'améliorait avec elle alors elle serait exemplaire. Pour l'instant, elle pensait qu'elle l'avait mal jugé. Peut etre depuis le début et sur toute la ligne. Elle regrettait d'avoir quitté sa nouvelle maison juste pour un caprice de méfiance stupide et inutile. Enfin non. Elle avait rencontré un libéré. L'air frais de la nuit faisait se mouvoir sa robe blanche.

- Installez vous où vous le voulez... Je vous en prie.

Elle se dirigea pour sa part sur le bord de la corniche, vers le vide. Elle ignorait où le jeune Neko déciderait d'aller mais il ne serait pas très loin de toutes façons.